WoW Classic, comme bien du monde, on l’attendait de par chez nous. Depuis son annonce, juste avant qu’on parte vivre en NZ.
En plus, la sortie était prévue pour août, idéal pour se calfeutrer pendant l’hiver néo-zélandais (il a rien de spécial hein, mais je suis frileuse et sujette à la déprime saisonnière…). Donc on a attendu, on en a pas mal parlé … qu’est-ce-qu’on ferait, quelle classe, quelle spé, le passé, tout ça. Mon homme et moi on s’est rencontré sur WoW, donc, beaucoup de souvenirs. Nous sommes encore en contact avec des gens qu’on avait rencontré sur notre serveur.
Après Lich King, les extensions, l’ambiance et le nouveau système de talents, ont commencé à nous emmerder, à avoir raison de notre enthousiasme. « C’était plus comme avant ». Ce qu’on aimait n’était plus là. Et socialement, c’était de pire en pire. Si tu as commencé Wow avant 2008, tu l’as forcément remarqué aussi. Du coup, on montait nos persos à chaque extension, par curiosité et comme pour se donner une chance d’être reséduits, mais à Battle for Azeroth, on a juste lâché l’affaire. Même si l’extension était pas mal, on était déjà trop usés.
Et c’est bien ça qui fait que WoW Classic a vu le jour : la grande majorité des joueurs de Vanilla avaient une très grosse nostalgie… à savoir un certain esprit plutôt amical, les potes, l’effort commun, les raids qui se méritaient, les gens sympas et utiles étaient connus, les connards aussi, pas de Sésame, donc pas de générations de persos haut niveau sans âmes, du PVP sauvage, beaucoup de PVP sauvage, la joie quand tu avais un bleu qui tombe, le commerce, etc etc etc. Toute une époque, qui n’a cessée d’être de plus en plus relatée sur les forums d’année en année, proportionnellement à la lassitude des joueurs.
Jusqu’à ce que Blizzard prenne l’honorable décision de sortir WoW Classic
Malgré notre plaisir à cette annonce, durant la longue attente, on émettait quelques doutes dans nos discussions : est-ce-que tu penses que ça va vraiment être comme avant ? Est-ce-que nous on a changé ? Est-ce que ça va toujours être notre truc ? Est-ce-que ça va vraiment avoir le succès escompté ? Est-ce-que ça va faire un flop ? Est-ce-que … Et si …
Le jour de la sortie est arrivé plutôt rapidement, car on a été trèèèès occupés à se faire une vie en NZ. Curieusement, intuition ou autre, je n’ai pas été surexcitée quand le 19 août 2019, WoW Classic sortait enfin. D’ailleurs, pour éviter de faire la queue comme des cons avec le rush du premier jour, et de galèrer misérablement dans les zones de départ, on a décidé d’attendre quelques jours, histoire que les zones de départ se désengorgent, qu’un certain % de joueurs se rendent compte que c’est pas leur truc et retournent sur WoW Retail. Bon, et je déteste faire la queue. IRL ou ailleurs.
Pendant cette petite période, l’ancien GM de la plus grosse guilde de mon ancien serveur m’annonce qu’il va sûrement reformer sa guilde, ses anciens fidèles étant revenus vers lui. Nous étions amis, mais je n’étais pas dans guilde, j’avais créé la mienne, moins corporate. Ce GM étant une excellente personne que j’apprécie beaucoup, l’idée de le rejoindre nous semblait cool, et retrouver quelques personnes pourraient être sympa.
La Horde, d’imbéciles
Arriva donc, le jour où nous nous sommes connectés, hop, level 1, Forêt des pins argentés, reset.
On me saute direct dessus en privé « waaahou t’es là, génial » , chaud au coeur mais en même temps … oula. On m’invite direct dans la guilde, et je refuse car ce que je voulais surtout, c’était profiter de la reprise avec mon homme, je l’explique, je sens que ça surprend. Avoir une vie a toujours un peu surpris. Tant pis. Je précise aussi que moi, mon truc c’est le PVP, « aucun souci ».
Pendant ces quelques jours, où nous étions juste nous deux, l’ambiance du serveur était juste pourrie, floodé de conneries constantes sur tous les canaux, j’avais l’impression d’être coincée dans une classe de 6ème. C’était constant, n’importe où, à n’importe quelle heure. Nous, on aime rire, on aime la grossièreté, on aime causer, on aime l’humour noir, très noir, mais là disons, c’était juste… pathétique. Passer tous les canaux en ignore au bout de 3 jours… super l’ambiance.
Il y avait certes, bien plus de gens polis, sympas, que dans Wow Retail (disons 20% de +), mais franchement pas assez.
Il y a deux types de joueurs sur WoW. Deux. Ceux qui sont là pour le plaisir. Ceux qui sont là pour réparer un ego malmené IRL. Dans les deux catégories, on trouve aussi bien des gens qui s’ennuient de leur vie, qui ont beaucoup de boulot, qui raident régulièrement, où qui sont des casuals, ou qui sont GM de grosses guildes. Ce n’est pas une question de ce qu’ils font, mais de pourquoi ils sont là à la base.
Les meilleures guildes que j’ai connu étaient toutes dirigées par des gens très sains.
Meilleures ne veut pas dire grosses et avancées. J’ai aussi vu des grosses guildes, dont les gens s’accommodent de l’ambiance moisie pour avoir du stuff, réduits à passer des heures de Samedi soir, dans une ambiance de merde, pour espérer voir tomber une pièce. C’est un peu comme la vie d’entreprise. (ça me fait penser à une amie qui bosse chez Bel, un géant du fromage industriel, qui semble avoir une culture d’entreprise datant des années 80, dont les employés ne sont pas spécialement heureux mais restent parce qu’il faut bien vivre… elle s’est battue 2 ans pour avoir enfin une augmentation : de 0.9% ).
Tombée au mauvais endroit
Au bout de quelques jours, nous étions prêts à rejoindre la guilde, qui avait déjà recruté beaucoup de personnes. Les connaissances de connaissances de connaissances, c’était open bar. De jour en jour, le chiffre gonflait. Mon erreur a été de croire que cette guilde serait ce qu’elle m’avait parue il y a des années. Le GM était toujours aussi cool, mais avaient pris pour officiers des personnes qui n’avaient qu’une obsession : être le premier 60, le premier à ceci, le premier à cela. Et ces objectifs étaient vécus malsainement, avec obsession. C’était un spectacle ennuyeux, affligeant.
My « unpopular opinion », ce sont des objectifs parfaits pour oublier une vie de merde (ponctuelle ou chronique).
Est-ce-que je méprise les gens qui sont 18h/24 sur le jeu ? Non, parce que ça m’est déjà arrivé, et que ça a été une bouée de sauvetage pendant une période difficile. Non, parce que c’est arrivé à mon homme, lui aussi pendant une période difficile de sa vie, où d’ailleurs il se faisait juger pour ça. Et qu’au final, la période difficile est passée, on s’est trouvé, on a construit une aventure de fou au bout du monde où nous sommes très heureux. Les passages à vide, ça arrive et ça ne nous définit pas.
En revanche, revoir certains types qui, 15 ans après sont toujours connectés de 7h du mat à 23h30, me désole pour eux. Je pense que ça reste une exception, j’étais décidément mal tombée.
Mais, à la base, aucun soucis pour moi, car chacun ses choix, sa vie. Cependant, se connecter pour assister à des constantes conversations ennuyeuses ou agressive de joueurs en mal d’ego, en mal de vie, c’était assez toxique pour moi. Le recrutement au hasard avait juste rempli la guilde d’un fort % de cons.
Et ça, ce n’est pas spécifiquement WoW, c’est le juste Internet en 2020 : haters et cons.
Qu’est-ce-qu’un con ? Le philosophe Aaron James, auteur de Assholes, a theory, décrit un individu s’inventant des avantages particuliers dans la vie sociale et se sentant immunisé contre les reproches. Au cours de l’évolution, les cons se sont très bien adaptés à leur milieu. Un succès reproductif qui a dû se jouer chez les primates dans les comportements de dominations masculines et les jeux de pouvoirs afin de se maintenir au sommet.
La connerie narcissique dans les MMORPG est un véritable fléau.
Les invitations pour en faire venir encore plus coulaient à flot, par contre pour les dégager ensuite, c’était un gros problème. Au bout d’un mois, c’était constamment, insultes, domination, irrespect, chaque conversation tournait toujours mal, sauf quand le GM était là. C’était très déprimant de tomber à ce niveau-là, avec des personnes qui ne savaient juste pas se comporter en groupe. On a souvent ri du fait que ceux qui passent le plus de temps à discuter technique de pointe et optimisation sur le canal guilde, sont loin d’être de bons joueurs. On a moins ri, quand les gens intéressants, sympas et mûrs se sont tirés les uns après les autres.
Dramaland, masculinité toxique, cour de récré
Ca demande des couilles de gérer un groupe, mais surtout beaucoup de sagesse. Car il faut prendre des décisions pour le bien commun. Mais quand le bien commun c’est « finir les raids le plus vite » … le côté humain en prend un coup. Pourtant, c’est ce que je préférais dans WoW Vanilla… C’est un peu tout le malheur politique du monde moderne, mais personne n’a l’air d’apprendre.
Le Discord avait son lot quotidien de dramas, des dramas pathétiques, fait de gamins foutus d’avance, qui se plaignaient autant de l’échec de leur vie qu’ils n’affichaient une connerie profonde.
Le système de communication des cons est le même partout : imposer sa connerie, rabaisser ceux qui la font remarquer sous couvert d’humour, retourner la situation contre les autres. Quand on laisse ce genre chose s’installer, il n’y a plus de place pour le reste.
« Il n’y a pas de concurrence possible avec un con. Le meilleur moyen reste la fuite. »
Jean-François Marmion, Psychologie de la connerie
Et franchement, avoir quitté la France, ses dramas politiques, nos dramas familiaux, pour vivre dans un lieu civilisé et moderne comme Wellington, s’être habitués à une vie 0 drama depuis 2 ans, pour retomber aussi bas à cause de WoW Classic, cela n’était pas possible.
Nos petits verres du soir, face à face dans le canapé, où nous parlons de nos projets, rêves, idées, se sont vus pollués par des conversations sur le niveau de bêtise qu’on venait de rencontrer. Cela n’était plus possible non plus. On était désolés pour notre GM, qui, je pense, se trouvaient un peu partagé sur le moment, pour contenter tout le monde.
Je me suis rendue compte que l’accueil chaleureux qu’on m’avait réservé au début, c’était surtout parce qu’on espérait des 60 dans les rangs assez vite. Ce qui était loin d’être le cas pour moi, parce que j’ai une vie, très, très remplie, ce qui n’était pas le cas à ce point durant mes études.
Cette problématique de sabotage des aspects humains à des fins de performances, je l’ai rencontré dans de nombreux groupes et communauté. Garder des sacs à merde parce qu’ils font le boulot, ne finit jamais vraiment bien. J’ai pourtant vu, sur WoW, et ailleurs, des équipes très haut niveau, où tout se passait bien. Je pense que c’est vraiment une histoire de personnes. (Au cas où tu as envie de me dire que « c’est comme ça, les guildes à prétention HL »).
Depuis tout ce temps, j’ai aussi développé une tolérance 0 pour la méchanceté bête, l’irrespect et la connerie heureuse. Et cela m’a beaucoup apporté. En plus, il est déjà bien difficile de rencontrer des gens sympas, sains, et drama free en vrai, pour ne pas se les taper sur un jeu censé nous détendre.
Le canal guilde caché dans un onglet à part, je suis donc venue de moins en moins, affligée. Puis un jour, au 21ème siècle, alors que je ne m’y attendais plus, j’ai eu le droit aux remarques d’australopithèque surpris d’entendre une nana sur Discord. Je t’épargne le niveau et les détails.
Voilà, c’était fini. Je n’ai pas /gquit, j’ai juste arrêté de venir. Je n’ai pas eu envie de trouver une autre guilde, de jouer sans guilde, de changer de serveur, ou autre. J’étais dégoûtée d’avoir perdu mon temps. Et j’avais aussi beaucoup de boulot passionnant.
Ma vie, et les activités qui la composent, est beaucoup mieux lorsque je sélectionne qui et quoi en fait parti. Le hasard des (mauvaises) rencontres, ce n’est plus pour moi. Ouais, un peu control freak, je l’admets. Mais au final, je ne perds pas mon temps, et je ne me laisse pas parasiter par des mentalités qui ne me conviennent pas.
Sauf cette fois. Par nostalgie, je me suis foirée. Je le vois clairement après coup, Wow Classic, ça pouvait que ne pas me convenir.
Ma triste conclusion
WoW Vanilla, la Horde des années 2000, c’est bel et bien fini. À l’époque, selon mon expérience, on trouvait dans la Horde, des gens plus mûrs (et je ne parle pas d’âge). Des vrais, des affreux, des Hordeux. Maintenant, ça a l’air d’être le contraire. Je me dis que tous les gamins nés en 2000 qui ont commencé à jouer à WOW en 2012 (où le côté humain était déjà bien détérioré), se sont pointés sur Wow Classic, à 19 ans, et dans la horde parce que c’est trendy.
Sur Wow Vanilla, nous avions profité du jeu à tous les niveaux, avec une expérience humaine de haut-vol, qui je pense, ne plus se reproduire aujourd’hui.
Les successions d’extensions de World of Warcraft, et ses refontes, ont habitués les nouvelles générations de joueurs à la facilité, à l’impolitesse (tu en trouvais encore des Bonjour, Merci, Bonne journée en instance?), à se stuffer facilement. À WoW Vanilla, tu dépendais beaucoup des autres, et une réputation de connard finissait par jouer contre toi. Et tu n’avais pas de sésame ou de changement de nom dispo pour « refaire ta vie ».
Honnêtement, je n’ai jamais lu et entendu autant de conneries de ma vie sur le web en si peu de temps.
Les joueurs de 2019 sont-ils 3 fois plus cons que les joueurs de 2005? Ou alors, est-ce-que WoW n’attire plus que les cassos? Il y a vraiment une étude sociale à faire.
Est-ce-que ces cassos ont déserté Classic depuis que je me suis tirée? Aucune idée. Et je n’ai pas envie de savoir.
Peut-être que je jouerai un peu, un jour, sur un serveur Pacific, par curiosité, pour voir la différence. La mentalité générale (et le type de connerie) des gens est très différente de la France, et je suis donc curieuse de voir si cela change quelque chose ou pas.
Je suis sûre que le GM a su redresser la situation depuis le temps et transformer ce gros pâté de départ en belle guilde, car c’est une belle personne, très intelligente, mais je n’ai pas envie d’aller vérifier.
Tu vois, ma déception en WoW Classic n’est pas liée à l’expérience de jeu, aux décisions de Blizzard, aux BG, au layering. Elle est liée aux gens.
La vie est trop courte non ?
Toi qui me lis, as-tu aussi été déçu par Wow Classic ? Ton expérience m’intéresse.