Nous sommes le 25 décembre 2019, à Wellington, en Nouvelle-Zélande. « C’est Noël ! », et pourtant il fait chaud, le soleil brille sur un ciel bleu, il fait jour jusque tard. C’est un Noël aux antipodes.
Avant de venir vivre en Nouvelle-Zélande, j’avais lu un article sur Frog in NZ, que je n’ai pas réussi à retrouver, où un expat donnait des points à prendre en compte, avant de prendre la décision de s’expatrier en NZ.
« Faire le deuil de vos Noël d’hiver »
Abandonner les Noël tels qu’on les connait, en faisait partie. Pour peu que vous fêtiez Noël, de façon modeste ou grandiose, croyant ou commercial, vous avez sûrement des souvenirs émotifs et sensoriels forts, liés à cette période de partage, où l’on fait un effort pour rendre les choses spéciales. Cette énergie déployée massivement à travers un pays, rend l’atmosphère spéciale.
Pour ma part, le Noël parisien est très marqué. Il y a toujours eu cette même ambiance dans les rues, où ça grouille de partout, les gens sont affairés, sous les lumières décoratives des grands axes. Les enfants défilent devant les vitrines animées des grands magasins. Des types font des marrons chauds aux sorties de métro. Il y a la queue dans les boutiques de quartier, chacun veut avoir son élément spécial qui fait son Noël, sa bouteille, son plateau de fromage, son pain, sa dinde, ou comme chez nous : sa truffe.
Mon homme avait pour mission, en sortant du boulot le 24, de passer à la Maison de la Truffe pour en ramener une petite. Il y faisait la queue, parmi les gens qui venaient en acheter pour 500 euros de bien grosses, ou pour 20 euros de brisures, tous là par amour de cette saveur unique, qui teintait aussi leur table de Noël. Je l’attendais impatiemment pour admirer le diamant noir. On la râpait dans de la mascarpone à température ambiante, qu’on fourrait ensuite dans les camemberts et bries aux laits crus que j’allais chercher à la fromagerie Beaufils de mon côté, pour les infuser, et rendre si spécial notre plateau de fromages.
Nous allions, le jour J, à la Grande Epicerie, choisir une de leurs créations de desserts de Noël, toujours fabuleuses, pour la partager généreusement.
Ce sont mes derniers souvenirs d’adulte en ce qui concerne le Noël parisien. Mais, depuis mon enfance, cette odeur froide et parfumée des rues et des cuisines qui mitonnent, cette sonorité faussement calme dans les rues pendant que les gens festoient, c’est cela qui m’était unique. Indescriptible à vrai dire. Comme vos propres souvenirs.
Je savais bien sûr que tout cela serait fini en venant vivre en Nouvelle-Zélande
« Noël en été » me semblait un concept bien abstrait, piquant ma curiosité, sans plus. J’étais prête à expérimenter quelque chose de nouveau.
Aujourd’hui, c’est notre 3ème Noël à Wellington. Noël n’est pas très présent dans la rue comme en Europe. Il faut le créer chez soi. La ville et les centres commerciaux (mall) se payent 3 ou 4 sapins géants, des maisons mettent quelques lumières en déco, mais c’est tout. Rien de bien folichon. Rien de magique. Et ce, malgré les « efforts », et les évènements de la mairie « A very Welly Christmas »…
Cela inclue une parade de Noël le 24 Novembre. Novembre, oui. Pour en avoir testés, les events de rue à Wellington ne sont pas trop notre truc, donc on les zappe.
La Nouvelle-Zélande a une majorité écrasante de chrétiens, et les valeurs de Noël sont très tournées vers la famille, les enfants, et la maison. Le 24, les gens pour la plupart ne font pas de réveillon, c’est le 25 qu’ils fêtent vraiment Noël.
Nous, nous avons gardé notre tradition du 24 au soir.
Moore Wilson (qui pourrait être comparé à la Grande Epicerie de Paris, à l’échelle de Wellington), est blindé le 23 décembre, où l’on fait les dernières courses pour le repas de Noël. D’ailleurs, je dois admettre, que zigzaguer en soupirant, entre les gens, pour se faire un chemin dans les rayons, est presque nostalgique. Car il y a rarement foule dans les endroits de Welly.
Les gens ne travaillent pas le 25, ni le 26 qui est aussi férié (« Boxing Day »), du coup pas de courses de dernière minute possible, pas de chocolats à la va-vite pour un invité surprise, pas de traiteur ou de bûche à aller chercher le jour-même.
Plus de 75% des entreprises en NZ, ne considèrent pas, à tort économiquement parlant, l’avantage commercial à être ouvert le 25. La NZ est surtout faites de petits businesses, dont les propriétaires tirent volontiers un trait sur le profit pour être en famille. Le concept d’embaucher du staff temporaire pour ces jours, n’est pas très prisé. Dommage, il y a beaucoup de gens qui ne fêtent pas Noël et pour qui c’est un jour comme les autres.
Plus de truffe, plus de tarama
Le sel de la vie, c’est d’être ouvert au changement. Et nous étions assez contents et curieux de voir ce que la NZ apporterait sur notre table de Noël. Malheureusement, pas grand-chose. La première année, nous avons tenté des recettes de Noël du magazine « Cuisine« , made in NZ, une référence ici. Ca n’a pas collé du tout, malgré les photos stylisées à la perfection. Du coup, nous avons décidé de faire au mieux, et de cuisiner ce qu’on aime à 100%. La Nouvelle-Zélande ne disposant des mêmes ingrédients essentiels à nos recettes, il a fallu réinventer le menu et chercher les perles rares : trouver du beurre français (le beurre NZ n’a pas le même goût, et ne fait pas de « beurre noisette » en fondant. Cela plombe bien des recettes), faire des vrais blinis (introuvable ici) renoncer à notre cher tarama (introuvable ici, ainsi que les oeufs de cabillaud nécessaires), trouver les bons fromages (et il faut de l’expérience vu les blagues qu’on peut trouver en étalage), faire notre propre bûche…
Je pense que ceci est notre expérience wellingtonienne, mais que les choses sont bien différentes à Auckland, qui abrite 33% des Néo-zélandais, et qui bénéficie donc de plus d’accès à la gastronomie et aux bons produits.
L’illusion est presque là
Mais non, décidément, maintenant j’en suis sûre, Noël ne sera plus Noël tel qu’on se l’imaginait, et aucun artifice ne peut changer ça.
À quoi bon trouver un bon claquos s’il n’y a pas un seul bon pain pour aller avec. Des imitations coûteuses il y en a beaucoup, mais jusque maintenant, rien de fiable. La NZ a des régulations agro-alimentaires différentes et strictes. Alors que nos pains français nécessitent des mélanges de centaines de levures, ici, les boulangers font autrement. Grand sujet, j’y reviendrai plus tard !
Qu’est-ce-que Noël si ce n’est la ritualisation et la transmission d’un souvenir d’enfance? Le mien est nocturne et mystérieux, froid mais chaleureux, sent le feu de bois et la bonne cuisine, implique de rentrer chez soi avec une bouteille, ou des patates, ou un pot de crème oublié, avec le nez rouge de froid et le sourire aux lèvres.
Vais-je me réinventer un nouveau type de Noël un jour? Je ne sais pas, je vous tiendrai au courant. Mais pour l’instant, Noël ne sera plus qu’un bon moment comme on en passe de nombreux durant l’année, grâce à cet endroit magique et à cette mer bleue turquoise, qui guérit tout et nous rend si vivants. Qui nous fait tout oublier.
Le 21 décembre, commence l’été en Nouvelle-Zélande
La plupart des oiseaux sont de sortie. À Wellington, l’air sent bon l’herbe et la mer. On commence à avoir « chaud ». Les jours sont longs. Les Pohutukawa de la ville fleurissent partout. Ces arbres natifs et sacrés, à la magnifique floraison rouge, sont considérés comme les arbres de Noël ici.
En somme, Wellington à Noël, est magnifique, et nous offre une expérience nouvelle, qui nous permet d’apprécier comme la vie change, et comme elle est différente aux quatre coins de la planète. On la réinvente. On se réinvente.
C’est aussi la fin de l’hiver, et on retrouve un souffle nouveau, en même temps que les arbres.
Il n’y a que dans le changement qu’on se rend compte avec sagesse de la valeur des choses qui sont et qui ont été.
Joyeux Noël 🙂
Parisienne à Wellington, j’ai décidé en 2017 de changer de vie et de partir vivre en Nouvelle-Zélande avec mon partenaire et mes 2 chats. Ce fut la meilleure décision de ma vie, ce pays m’ayant donné toutes les possibilités, surtout celle de renaître. Je reviens de loin. J’espère avoir le courage d’écrire à ce sujet un peu plus pour témoigner auprès de personnes qui auraient du mal à voir le bout du tunnel. Fortement influencée par la semaine de 4 heures et par ma croyance en un nouveau style de vie équilibrée entre vie perso et travail, j’ai créé et dirige avec succès plusieurs entreprises de ventes en ligne, un studio photo et j’élève mon fils né en 2021, sans crèche, sans famille pour aider si ce n’est mon partenaire. La chose la plus importante que j’ai apprise dans mon aventure : le bonheur n’a rien à voir avec le plaisir ou la facilité 🙂
1 Comment
Vrai début de nostalgie ou simple envie de pain & ‘claquos’ ? 😉